dimanche 18 novembre 2007

OpenSocial ou GlobalControl ?


Google n'en finit pas d'étendre son emprise sur l'Internet et pourtant, par extraordinaire, Google reste notre ami.

IBM, Oracle, Sun, Microsoft,... ces géants ont été l'un après l'autre l'objet de l'acrimonie soupçonneuse de l'opinion publique : position économique dominante, volonté d'exercer un contrôle global,... Avec plus ou moins de sérieux, nombreux étaient ceux qui s'inquiétaient de la volonté de puissance que ces entreprises d'ailleurs ne cachaient pas.

Avec Google, c'est différent. Elle conserve étonnamment l'image d'une firme adolescente, conciliant par magie une certaine idée de l'intérêt public et d'une réussite économique que semble illustrer sa fabuleuse capitalisation boursière - approchant les 250 milliards US$ (par la grâce de la progression continue de l'action de Google au Nasdaq, on trouve d'ailleurs près de 1.000 salariés de Google dont le portefeuille d'actions de l'entreprise dépasse les 5 millions US$).

Google est donc toujours notre ami alors que sa puissance de frappe ne cesse de progresser :

  • - 60% de l'ensemble des requêtes sur le Web sont traitées par un serveur Google
  • - sa régie publicitaire pèse autant que celles de TF1, M6 et France Télévision réunis.
  • - Google mène une politique un politique classique d'absorption de ses concurrents et de technologies qu'il juge complémentaires : Blogger, Orkut, YouTube, Jaiku, Measure Map, Twitter, Zingku, DoubleClick, Panoramio, Zenter, Urchin, Feedburner, Opera, Writely, Dodgeball.com, Jotspot, Sketchup, Marratech, Greenborfer, etc... (sans oublier le rachat de l'archipel Gogooroa, qui n'est toutefois qu'un canular symptomatique de cette boulimie).
  • - d'une manière générale, Google dispose d'un potentiel de filtrage, de traçage et de contrôle des flux d'information sans précédent : un contrôle qui, pour le moment, ne s'affiche clairement que lorsqu'il s'agit pour la firme américaine de répondre favorablement aux injonctions de filtrage, notamment des gouvernements chinois ou thaïlandais.
Monstre à sang froid, Google cultive d'autant plus cette image adolescente de rebelle du Web (une stratégie adoptée précédemment par Apple dans sa lutte contre l'ogre Microsoft) ce qu'illustre magnifiquement le feu de camp organisé pour présenter publiquement l'application qui se situe au coeur de la stratégie de développement du groupe pour les prochaines années : OpenSocial. Loin des grandes messes De Bill Gates ou de Steeve Balmer, de sympathiques développeurs en chemise à carreaux ont exposé les grandes lignes de ce qui est présenté comme une révolution moins technique que sociale.

OpenSocial : quid ?

D'un point de vue technique

Il s'agit pour Google de bâtir une plate-forme commune d'applications Web (API) à partir de langages ouverts et largement maitrisés par la communauté des développeurs (Ajax : Javascript, HTML, XML HTTP Request) et permettant aux différents réseaux dits "sociaux" (Orkut, MySpace, Ning, Viadeo,...et bien sûr Google) d'être interopérables. Ainsi, les applications pourront être partagées, à commencer par toutes celles basées sur le profiling, c'est à dire les données stockées dans les profils des utilisateurs de ces sites (informations personnels, contacts et réseaux relationnels, etc..). Le tout au nom des principes martelés par Google : "nous voulons rendre le Web meilleur, plus simple, plus ouvert, etc.."

D'un point de vue économique

Le premier avantage, circonstanciel, d'OpenSocial pour Google, c'est qu'il constitue une riposte à son rival FaceBook qui a pris quelques longueurs d'avance en matière de profiling avec sa technologie propriétaire et qui bénéficie dorénavant du soutien de Microsoft (entré dans le capital récemment). OpenSocial lui permet également de poursuivre sa stratégie d'externalisation (par rachat ou dans ce cas précis par la mobilisation de la communauté de développeurs) et de réduire ainsi les coûts de développement des applications qu'il sert. Plus fondamentalement, OpenSocial placera Google au centre des échanges de flux et de données personnelles sur les utilisateurs c'est à dire à une place décisive pour opérer le ciblage comportemental dont les publicitaires ont besoin... et dont Google fait partie et entend prendre la tête.

Comme TF1 dont l'activité n'est pas de faire de la télévision mais de vendre "du temps de cerveau disponible", la stratégie de Google est finalement moins de révolutionner l'Internet, que de révolutionner la publicité comme l'illustre l'expression florissante de nos jours de "Publicité 2.0" en écho au fameux "Web 2.0".

D'un point de vue idéologique

La multiplication des applications, des usages et des utilisateurs de réseaux dits "sociaux", s'appuie sur une aspiration aux proportions inédites dans l'histoire de l'Humanité. Partage, rencontre, échange, idées et créations librement diffusées, etc.. bref, l'expression d'un désir de réalisation personnelle en dehors de tout cadre marchand. La captation de ce désir est sans doute la plus grande victoire de Google, c'est une victoire idéologique qu'il aura pu (provisoirement ?) gagner sans grande difficulté, le terrain étant laissé vacant par toutes les puissances publiques et démocratiques, à commencer par la France, qui auraient là matière à inventer et à déployer de nouveaux services publics, au service de l'intérêt général et du développement de chacun.

A quand la riposte avant que nous soyons tous engooglés ?

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Voir aussi sur FaceBook

http://bibliothecaire.wordpress.com/2007/11/15/facebook-pourquoi-et-comment-le-quitter/

Vincent T a dit…

Bonjour,

J’ai fait un petit outil de self-privacy-defence qui marche avec Firefox. Ca génère des fausses recherches et de faux cliques sur Google (et yahoo aussi) et ceux de façons réaliste. Plus d’infos sur le site : http://squigglesr.free.fr (ou en français : http://squigglesr.free.fr/spip/spip.php?rubrique11).

Vincent

Anonyme a dit…

Et il y a déjà deux ans, Geek paradise Inc

Frank Mouly a dit…

Exemple récent de censure de Google en Egypte article du Monde du 29 novembre 2008.

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